Hebdo du lundi 9 mars 2015

Comme chaque année, sous prétexte de journée mondiale des droits des femmes, surgissent de toute part des offres promotionnelles de lingerie et d'épilation. Pourtant, ce devrait être autre chose que la vieille blague « une journée pour elle et le reste de l'année pour lui ». Il n'est pas nécessaire de plonger bien profond dans l'actualité internationale pour mesurer le chemin qui reste à parcourir.

Mais ce n'est pas la peine d'aller chercher les pires régimes caricaturaux dans des pays plus ou moins lointains. En France, les inégalités dans l'orientation scolaire et le partage des tâches ménagères conduisent à des différences de position sociale et de revenu injustifiables. Les écarts se sont semble-t-il réduits, mais avec un tel train de sénateurs qu'il faudra des siècles pour atteindre l'égalité. Et ne parlons pas des femmes politiques qui voient encore leur toilette aussi commentée que leurs idées.

Et dans le jeu de rôle ? Où en sommes-nous, aussi bien dans les joueurs et meneurs que dans les jeux eux-mêmes ? C'est une question complexe et qui ne peut être traitée dans un court texte comme celui-ci. Notons tout de même quelques points. Pour ce qui est des participants à notre loisir favori, si la parité est encore loin, la proportion de femmes n'est pas négligeable, et il faut noter que certaines ont des rôles importants, à notre échelle de produit de niche, bien entendu. Il paraît que le déséquilibre est pire aux USA, mais peut-être cela évolue-t-il également.

Et dans les jeux ? Autrefois, certains jeux pouvaient limiter les personnages féminins à des rôles très stéréotypés : prostituées et assimilées, vierges saintes, etc. D'autres proposaient une création de personnage différente selon le sexe : -1 en force et +1 en dextérité pour les femmes, par exemple. Ou bien les caractéristiques connaissaient des limites plus basses pour les personnages féminins. Dans les jeux les plus répandus, ces tendances se font aujourd'hui plus rares. L'ouverture d'esprit de D&D Next par exemple, sur les questions de genre, a été remarquée.

Il reste que nombres de jeux opèrent suivant un imaginaire masculin, orienté vers les affrontements physiques, voire la course aux armements ; que nombre de couvertures visent des jeunes mâles hétérosexuels et que chez les créateurs de jeux, le déséquilibre du sex-ratio reste fort. Si cette journée peut nous servir, que ce soit à nous interroger collectivement sur ce qui pourrait faire des rôlistes un groupe plus diversifié. Car ce n'est pas seulement en matière de genre que nous pratiquons à l'excès l'entre-soi.

Et prenons les jeux des dernières fiches du GRoG : SteamShadows semble écrit à parité. Ce n'est pas le cas de Paranoïa, doté d'auteurs strictement masculins. Les crédits de HeroQuest sont soumis à une écrasante domination masculine. Quant au Générique Play Dirty, c'est l'oeuvre d'un seul homme. Tout comme la nouvelle gamme Astonishing Swordsmen & Sorcerers of Hyperborea , qui de plus gagne le pompom de la couverture la plus sexiste, incapable d'émerger des clichés les plus éculés de la Sword & Sorcery. La fiche de la semaine dernière de Babylon 5 provient elle également d'un seul code génétique XY. Americana, autre nouvelle gamme, est aussi l'oeuvre d'un unique auteur masculin, même si elle est dépourvue de tout sexisme en couverture. Et la troisième nouvelle gamme de la semaine passée sur le GRoG, Exemplars & Eidolons, ne déroge pas à la règle qui a frappé les deux autres : un auteur, masculin.

Le mot de la fin ? Toutes les fiches mentionnées ont été rédigées, corrigées et validées par des hommes. Bref, peut mieux faire.

(1091 jeux, 11205 ouvrages, 23 systèmes, 14810 critiques, 468 jeux amateurs, 1009 éditeurs, 2051 bios, 4383 utilisateurs)